> Pense et s'ennuie - PV Ritsu'

Le soleil s’était levé. Je l’avais vu poindre au loin, dans la prairie, je l’avais vu jeter ses lumineux reflets rouges-oranges-jaunes sur l’herbe verte. Et j’avais rencontré Ritsuka. Bien gentil, beau, mais pourtant l’air … solitaire et renfermé. Quoique je dusse avoir le même air. J’avais aussi, malheureusement, rencontré Sobî, et j’avais eu le temps d’apprendre à le détester. Eh oui … J’avais passé longtemps dans cette prairie. On aurait dit que Ritsuka – qui, je précise, embrassait comme un dieu – et moi jouions au chat et à la souris. En revanche, je ne sais même pas ce qui, dans nos attitudes, me fait dire ça. Mais bon. Et maintenant, assise dans le hall, au rez-de-chaussée de cet immeuble impressionnant par sa grandeur et son importante ‘‘délabration’’, si j’ose dire, – c’était à se demander comment il tenait encore debout – je me repassai cet espèce de film dans mon esprit-mini cinéma, tout en réfléchissant.

Je me demandais ce que j’allais faire durant le restant de ma journée. Le temps continuait de marcher alors que j’étais recroquevillée au fond de ce hall à réfléchir. Je relevais la tête, et vit que le soleil avait un peu dépassé son zénith. Quoi ? Cela fait une heure que je suis ici, et comme ça ? Et bah … pensais-je simplement. Après tout, zut, je m’en fichais, que l’astre du jour poursuive sa folle course aussi rapidement. J’avais toute ma vie devant moi, et rien à faire durant ce laps de temps … Je me levai, m’époussetais, et allai me coller le côté droit à la vitre qui donnait sur la ‘‘rue’’. J’avais la tête tournée vers la porte, mais je pouvais voir dehors et dedans aussi bien que devant moi.

Le ciel, désespérément gris, ne me rendais pas plus morose que d’habitude. Habituée à cette couleur du le voile qui recouvrait Despéra … Despéra est une ville pour le moins désespérante. J’avais juste envie de faire ce jeu de mots idiot … qui se révèle pourtant juste, toutefois. Mes lèvres restaient empreintes du goût de celles de Ritsuka. Je ressentais encore la sensation que j’avais lorsqu’il m’embrassait. Bizarre … ou pas. Pffff … cela ne servait à rien que je me torture l’esprit avec des futilités idiotes. Mais que faire, sinon ? Eh, oui, ici, on a pour habitude de s’ennuyer ferme. Au moins, dans cette prairie, je ne voyais pas le temps passer. Mais bon …

Je pris une mèche de mes longs cheveux pour les entortiller sur mon index en soupirant. C’était un geste que je faisais assez rarement, généralement, c’était quand je m’ennuyais encore plus que d’habitude, ou que j’espérais quelque chose … ou quelqu’un.

Ennui mortel. Ennui total. Ennui désagréable. Ennui détesté. Eh oui, je m’ennuyais comme jamais, je m’ennuyais en plus de quelqu’un. Et ça, c’est pire que n’importe quel ennui, c’est pire que tout. Alors que mon film passait en boucle dans mon esprit-cinéma – film dont je ressentais parfaitement les sensations, évidemment – mes pensées, lentement, se dirigèrent d’elles-mêmes vers un seul être, Ritsuka. Ritsuka … ce nom rebondissait dans chaque parcelle de ma cervelle, si bien que je dus fermer les yeux et me pris la tête dans les mains, car j’avais un mal de crâne terrible, à cause que l’envie de le voir était si forte et si présente.

Mon cerveau était sur le point d’exploser, et je restais là à subir pendant une bonne dizaine de minutes. Lorsque cela passa, j’avais un léger bourdonnement dans les oreilles, et je mis ma main sur mon cœur, haletante, de peur que lui aussi me fasse cette crise dans le désir de revoir le beau blond. Un désir omniprésent, et même pas voilé par une peur – inexistante, bien sûr – de devoir avoir affaire à Sobî. Puis je rouvris les yeux sur le ciel gris, et je me dis que j’étais pitoyable. Que mon corps était aussi pitoyable que moi. Non mais, me faire une crise pour ça, franchement … N’importe quoi. Je secouai la tête d’un air de pitié, pitié pour moi-même. J’étais à la limite de me coller une baffe, non pas que je devenais folle, mais justement pour éviter de sombrer dans la folie. Pour quoi ? Parce que j’avais simplement très, très, extrêmement envie de revoir quelqu’un que je venais de rencontrer le matin même et que j’avais quitté quelques heures plus tôt ? Allons bon, c’était du n’importe quoi ! Mais j’étais habituée aux réactions pour le moins extrêmes de mon corps et je pris sur moi.

Lorsque je fus sortie de mes pensées car une main se posa sur ma joue. Je posai machinalement la mienne dessus. Celle qui ne m’appartenait pas tourna mon visage vers celui du quelqu’un à qui appartenait la main … Un visage que je connaissais bien pour l’avoir longuement observé durant des heures. J’étouffais un cris de surprise et ouvrit des yeux ronds comme des soucoupes. Puis l’homme – oui, c’était un homme xD – posa sa main au creux de mon dos et m’embrassa. Malgré moi, j’ouvris des yeux plus rond encore. Puis, au bout d’un instant, l’instant de surprise passé, je me laissai faire, je me laissai simplement guider, mes méninges tournant à toutes vitesses. Cet homme, à chaque fois qu’il m’embrassait, me faisait fondre. Je me détendis enfin totalement.

Lorsqu’il arrêta, je le regardais pendant quelques secondes, un sourire illumina mes lèvres lorsque sa voix résonna, emplissant chaque parcelle de mon corps de bonheur. Je lui sautais dessus et me pendait à son cou, radieuse, mais je ne dis rien. Puis lorsque je le lâchai, mon regard croisa le sien et ne put s’en détacher. Je l’embrassais à mon tour, pendant quelques secondes moi, puis je lâchais :

« De nouveau te voilà … Excuse moi, ’y a des fois, j’contrôle plus mon corps … »

De nouveau, la sensation de bien-être, de chaleur que je ressentais dans mon corps dans la prairie fit son apparition. Mais cette fois, elle ne disparut pas au bout de quelques secondes, ni même quelques minutes, et je me doutais bien qu’elle ne disparaîtrait plus, en fait. Lorsqu’il me sourit, je lui rendit son sourire, et ça m’emplit d’une joie si extrême que … que … rien ? Si, une nouvelle sensation agréable vint s’ajouter à celle que je ressentais déjà. Je ne comprenais pas. Étais-je donc si bête que cela ? Sûrement. En tous cas, je ne comprenais pas. Point. À l’accoutumée, lorsqu’un garçon s’adressait à moi, la plupart du temps je le renvoyais au bout des cinq aux dix premières minutes. Mais là, quelque chose de nouveau m’arrivait. Et Dieu sait à quel point je déteste l’inconnu. Mais là, cela ne me dérangeait aucunement, car j’avais l’impression que toujours Ritsuka – car c’était lui – serait là pour me protéger de cet Inconnu. Me protéger du reste, pas besoin, sur ce point là.

Lorsque son rire – adulé de moi – s’éleva, une nouvelle vague de ces sensations déferla sur moi. J’étais sûre que, bientôt, j’allais faire un trop plein, ne plus pouvoir les ressentir, et cela m’effrayait. Mais finalement, je me dis que cela ne se passerait pas ainsi, et je m’apaisais à cette seule pensée.

- J’ai remarqué !

Puis il me fit … quelque chose. Quoi ? Rien à fiche. Je me laissai faire, essayant d’analyser cette situation et mes sentiments. Ceux-ci m’échappaient, et je ne pouvais le supporter. Mais comment réfléchir quand un homme vous fait … ÇA ? Cet espèce de je-ne-sais-quoi ? Enfin. À force de réfléchir, je finis par froncer les sourcils. Rah làlà. La vie n’était pas simple, c’était ce que je pensais. Avec tout ces sentiments qui s’entremêlaient en moi … Puis une possibilité, une simple hypothèse, passa comme un flash dans mon esprit. Et si … Non, je ne serai quand même pas … On en parle, souvent. On m’a dit que Papa et Maman l’étaient. Que Papi et Mamie aussi. Que Grand-Père et Grand-Mère, pareil. Est-ce que moi … ? Serait-ce possible ? Le seul inconvénient que je voyais, c’était que le sentiment auquel je pensais nous rendait plus faible, plus vulnérable … mais aussi plus fort.

J’étais tellement absorbée par mes pensées que j’entendis à peine sa question. Le temps qu’elle arrive à mon cerveau en train de se démener sur ‘‘l’’'autre question, que je la comprenne … Je levai les yeux et le regardais enfin. J’avais toujours les sourcils froncés. Puis je me repassais sa voix dans ma tête. La sensation qu’elle me procura ne fit que confirmer ce que je pensais. J’en étais à présent sûre – je pouvais me tromper, mais si vous n’êtes pas trop stupides, vous pouvez comprendre que NON, je ne me trompais pas –. Je m’agrippais à lui, l’enlaçais tendrement en répondant :

« Maintenant que tu es là, ça va très bien ! »